Le droit à la santé en Chablais :
Chronique d’une agonie programmée
Les Hôpitaux du Léman sont l’unique
structure de soins publique sur le bassin chablaisien. Fusion de deux hôpitaux
de proximité, Evian et Thonon, ils emploient plus de 1600 salarié(e)s et
assument chaque année plus de 40 000 séjours.
Depuis le vote de la loi HPST**, les
services de radiologie médicale sont organisés en Groupement d’Intérêt
Economique, pionnier des partenariats public-privé à l’hôpital Georges Pianta.
L’objectif est depuis toujours de
diminuer le coût de revient des soins en radio par la mutualisation des
appareils, mais aussi des salariés. Ainsi, depuis leur installation, le scanner
et l’IRM basés sur l’hôpital sont partagés entre les patients de l’hôpital et
les clients des cabinets privés partenaires. Ce qui a provoqué nombre
d’embouteillages aux urgences, dont l’activité ne cesse de croître, et un délai
de rendez-vous ambulatoires de plus en plus long, avec une nette dégradation de
l’image de l’hôpital dans la population.
Une autorisation pour positionner un
second appareil de scanner a été accordée pour le Chablais en 2007 et devait
être positionnée aux hôpitaux du Léman.
Depuis, les directions se sont
succédées mais les injonctions de l’Agence Régionale de Santé aussi :
accepter la nouvelle règle du jeu comptable, en faire toujours plus avec
toujours moins de moyens, et surtout garder un budget équilibré …. Sinon pas de
prêt bancaire, pas de projet, …
Les Hôpitaux du Léman se sont battus
depuis plusieurs années pour obtenir les financements incontournables, a minima
pour la remise aux normes de la réanimation, des urgences et bien d’autres
nécessités quand on fusionne pour réduire alors que les besoins augmentent
naturellement. Le projet d’établissement a envisagé plusieurs options, mais
l’évidence est depuis toujours qu’il faut de nouveaux bâtiments.
Tous les projets ont été à ce jour
rejetés par l’ARS qui refuse de participer financièrement. L’Hôpital s’est
endetté sur ses fonds propres pour le rapatriement des unités d’Evian
(construction du nouveau bâtiment), dans le cadre de la fermeture de celui-ci.
Et s’est vu imposer à la clé 45 suppressions d’emplois.
La bataille du 2ème
scanner était perdue d’avance, mais nous ne l’avons su qu’après. D’aucuns ont une
étonnante définition du dialogue social. C’est lors du dernier Comité Technique
d’Etablissement, le 7 octobre, que les représentants du personnel ont eu
connaissance de la chronologie :
Juin 2014 : l’établissement présente son projet
de budget avec les projets de mobilisation d’emprunts ;
Mi-juin : l’ARS rejette celui-ci et prie
l’établissement de diminuer ses ambitions de dépenses (emprunts). Or dans le
projet présenté figurait un emprunt concernant la construction du bâtiment pour
la restructuration de la radiologie et la mise en place du nouveau scanner.
Le 2 juillet les HDL présentent un nouveau
projet budgétaire diminué d’environ 2 millions d’euros.
Le 4 juillet, l’ARS informe par courrier que le
scanner sera installé dans les locaux privés du Centre Médical du Chablais, et
la mise à disposition du public se fera au 1er septembre.
Les cartes étaient donc déjà jouées
avant les vacances d’été, malgré les propos de la direction. Se jouer ainsi de
la population est intolérable, mais que dire du comportement vis-à-vis des
représentants du personnel ?
Qui peut être dupe désormais des
« assurances » données par Mme Wallon, directrice générale de l’ARS,
qu’elle « n’a pas de leçons à recevoir en matière de service public » ?
En effet, nous pouvons la croire !
Qui peut ne pas ressentir de colère
quand madame repart sans s’être formellement engagée sur une aide financière ni
sur son montant quant aux travaux qui seuls seront garants du maintien des
Hôpitaux du Léman sur notre territoire, et donc d’un résidu de service public
de santé ?
Qui peut la croire sincère quand
elle paraît ignorer tout des difficultés du pôle psychiatrie, de ses besoins en
bâtiments, de son financement ridicule et profondément inégalitaire en
comparaison des autres structures du territoire ?
Nous le savons bien, derrière tout
cela il y a une politique gouvernementale appliquée avec zèle : loi
Bachelot* et T2A***, réforme territoriale, loi de financement de la Sécurité
Sociale, … Cette politique nous la dénonçons depuis des années. Elle n’a
pour but que de livrer notre santé, celle de nos ainés, celle de nos enfants
aux marchés financiers et à la spéculation. Ce que nous savons aussi désormais, c’est que le
gouvernement a mis le turbo, et qu’il souhaite que tout soit définitivement réglé
en … 2017 ! Il nous reste peu de temps, deux ans avant l’échéance voulue
par le capital.
C’est
maintenant que nous devons construire cet « ensemble », au-delà de
nos différences, de nos divergences bien mineures au regard de l’enjeu.
Maintenant qu’il faut remonter les manches.
* EPRD : c’est le budget prévisionnel de l’hôpital, mis à jour par
trimestre.
** loi HPST ou loi
Bachelot :
réforme de la gestion du système de santé français, votée et mise en place en
2005 ; elle prévoit un redécoupage des régions administratives en territoires
de santé (5 territoires pour 8 départements en Rhône-Alpes), et la
mutualisation des moyens entre public et privé pour diminuer les coûts de la
santé du secteur public.
*** T2A : tarification à
l’activité :
chaque prise en charge en santé est découpée en soins dont chacun a une
cotation qui permet sa rémunération ; le problème, c’est que la moitié des
soins sont du temps qui ne peut être chiffré, il n’est donc pas rémunéré, et
ouvre la porte, au nom de la rentabilité, à l’augmentation des cadences de
soins côtés. Pas le temps de consoler !...
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