Ces jours-ci, sur son blog, Jean Denais (candidat non déclaré officiellement, mais chaque jour un peu plus dans les starting-blocks comme le prouve le dernier Thonon-magazine), portait un « coup de gueule contre les impôts et les taxes… ». Rejoignant ainsi le discours populiste ambiant anti-fiscal, malsain et dangereux pour la démocratie.
Une autre fiscalité, juste et efficace est possible, c’est une question de volonté politique.
Payer l’impôt
est un acte
citoyen !
… à condition qu’il soit
juste.
Payer l’impôt est un acte citoyen. Mais en raison de la pression
des patrons et des libéraux, des erreurs du gouvernement, de la faiblesse du pouvoir
d’achat, beaucoup de gens le considèrent comme une charge inadmissible.
Les mauvais choix des gouvernements successifs ont rendu le
système, au fil du temps, de plus en plus incompréhensible, de plus en plus
injuste.
Loin d’être une charge inadmissible, l’impôt nous fait surtout
beaucoup de bien tout au long de notre vie. Sans lui, par exemple, l’Etat
n’aurait pas les moyens d’assurer la sécurité, la santé, l’éducation, les
routes et autres infrastructures, l’accès à la culture. En s’attaquant aux
impôts, les patrons et les libéraux veulent en fait privatiser les services
publics.
L’impôt permet le vivre ensemble et au plus grand nombre de vivre
dignement en finançant les politiques publiques et les services publics qui
sont eux même source de développement économique et créateurs de richesse.
Loin de vouloir nous « en débarrasser » comme certains le
revendiquent, faisons d’abord la clarté.
L’impôt sur le
revenu
L’impôt sur le revenu est le prélèvement le plus « visible ».
Nous déclarons nos revenus, nous recevons un avis d’imposition et acquittons
cet impôt. L’impôt sur le revenu est progressif (le taux d’imposition augmente
d’autant plus que les revenus sont importants) c’est pourquoi il est aussi le
mode d’imposition le plus juste. Il représente pourtant moins d’un quart des
recettes fiscales. La moitié des contribuables ne paient pas cet impôt surtout
faute de revenu suffisant.
Les plus riches contribuent de moins en moins par rapport à
l’ensemble de la population. Ils ont aussi été les grands gagnants des réformes
de l’impôt sur le revenu surtout mises en place sous Sarkozy. Ils ont notamment
bénéficié d’une explosion des niches fiscales et d’une baisse des taux
d’imposition. Le taux maximum était de 65% en 1983. Il est, en 2013, de 45%.
Bien informés par leurs « conseillers fiscaux », les plus aisés accaparent la
majorité de ces aides publiques. 62% des niches fiscales sont utilisées par les
10% les plus riches.
Pour
qu’un impôt soit juste, il doit permettre à chacun de contribuer à hauteur de
ses moyens. L’impôt sur le revenu est construit afin de répondre à ce critère.
Réhabilitons l’impôt sur le revenu :
- en limitant drastiquement les
déductions fiscales à celles ayant démontré une efficacité sociale ou
économique ;
- en augmentant le nombre de tranches et
les taux d’imposition afin que chacun contribue à hauteur de ses moyens ;
- en taxant davantage les revenus du capital.
Réduisons le poids
de la TVA :
- en baissant le
taux normal de la TVA à 15 %
- en supprimant la TVA sur les produits de première nécessité
La Taxe d’Habitation et la Taxe Foncière
Pour obtenir le montant de la taxe
d’habitation, on
multiplie ce que l’on appelle
« la valeur locative
cadastrale » (valeur locative foncière), c'est-à-dire ce que rapporterait sur
un an l’habitation si elle était mise en location, par les taux d’impositions
votés par les communes. Ce montant peut être diminué de certains allègements
notamment en raison de conditions d’âge ou d’infirmité.
Le montant de la valeur locative de notre habitation est
le résultat d’un calcul complexe. Il tient compte de la superficie du logement,
des éléments de confort(nombre
de salles de bain par exemple), de l’état de l’immeuble, de l’attractivité de
sa situation géographique.
Sur le principe, la méthode est bonne.
Seulement, aucune révision de ces valeurs locatives n’a été effectuée depuis
1970. Résultat, elles sont très souvent largement surévaluées dans les
immeubles construits dans les années 1970 en périphérie des villes par rapport
à ceux des vieux quartiers de centre-ville maintenant réhabilités et, par
conséquent, sous évalués.
Se contenter d’une révision des valeurs locatives n’est pas
suffisant. En
effet, les valeurs locatives sont globalement très inférieures à la réalité du
marché et au final leur revalorisation pourrait faire doubler ou tripler le
montant de la taxe d’habitation. Cela accentuerait encore d’avantage les
inégalités, réservant les logements les plus agréables aux plus riches et
reléguant les autres encore plus loin de leur lieu de travail dans des
logements encore plus exigus et inconfortables.
Transformons les Taxe d’habitation et Taxe Foncière :
- en modulant les taux de la taxe foncière en fonction de l’usage
de la propriété
- en prenant en compte les revenus des
occupants et la réalité de l’habitat dans le calcul de la taxe.
- en révisant les critères de calcul de
cette taxe (ceux-ci sont basés sur des éléments datant de 1970) ;
La fiscalité des entreprises
L’Impôt sur les sociétés
A en entendre les patrons, les entreprises sont asphyxiées par
l’impôt sur les sociétés. Pourtant, le montant de cet impôt est un quart de la
TVA : 36 mds € dans le budget 2014, contre 140 mds € de TVA et 75 mds d’impôt
sur le revenu.
Le taux de l’impôt sur les sociétés a régulièrement baissé. Il
s’établit actuellement à 34 %. En réalité, ce taux est beaucoup plus faible. En
particulier, le taux réel d’imposition des grandes entreprises est de l’ordre
de 8%. En effet, la loi permet aux grandes entreprises d’afficher leurs
bénéfices dans les pays où le taux d’impôt sur les sociétés est plus faible.
C’est ce qu’on appelle « optimisation fiscale ».
De plus, les entreprises reçoivent beaucoup d’aides de l’Etat et
des collectivités territoriales. Il faut comparer l’impôt sur les sociétés aux
200 mds€ d’aide accordées entreprises.
La fiscalité locale des entreprises
Les évolutions récentes en matière de
fiscalité locale ont largement mis en danger les finances des collectivités.
Elles ont principalement eu pour conséquence d’alléger la pression fiscale sur
les entreprises et cela notamment à l’occasion du remplacement de la Taxe
professionnelle (TP) par la Contribution économique territoriale (CET).
Ces dernières années, les collectivités
se sont vu attribuer de nouvelles compétences sans pour autant recevoir les
transferts financiers correspondants. En 2014 et 2015, la dotation de l’État
sera même, chaque année, réduite de 1,5 milliards d’euros.
Les conséquences sont graves. Les
collectivités n’ont d’autre choix que de se tourner vers les ménages! À l’heure
actuelle, les collectivités locales n’ont, en effet, quasiment plus aucun moyen
de modifier le niveau de prélèvement sur les entreprises. Ce sont donc les
particuliers, parfois les plus modestes, qui mettent la main à la poche pour
financer les allègements consentis aux entreprises. Malgré tout, cela ne
garantit pas un niveau de financement suffisant pour le maintien de services
publics de qualité.
Luttons efficacement contre l’évasion et la fraude fiscale
La fraude fiscale et les paradis fiscaux sont désormais dans le
collimateur de l’Union européenne et des grandes puissances économiques. En
France, nous en sommes au neuvième rapport parlementaire en quinze ans sur le
sujet.
Les avoirs détenus dans les paradis fiscaux sont estimés entre
20000 et 30000 milliards d’euros. Le montant annuel de la fraude dans l’Union
européenne était estimé en septembre dernier à 1000 milliards d’euros par le
Parlement européen. Aujourd’hui, la Commission européenne l’évalue à 2000
milliards d’euros, soit l’équivalent du PIB de la France… L’énormité des sommes
montre l’importance de l’enjeu. En France les estimations varient mais elles
vont jusqu’à 80 milliards d’euros par an.
L’absence d’harmonisation européenne en matière de fiscalité,
l’absence également de coopérations au niveau mondial, de même que la
déréglementation des économies expliquent essentiellement l’évasion fiscale. Le
durcissement de la législation doit s’entendre au niveau international et au
minimum au niveau européen.
Faisons de la fiscalité des entreprises un moteur pour
l’économie et le progrès social :
- en subsistant à l’actuel CET une
nouvelle fiscalité locale à destination des professionnels modulable en
fonction de la politique des entreprises en terme d’emploi, de salaires,
d’investissements, de formation et de l’environnement... Il est également
essentiel que ce nouvel impôt, remplaçant la CET, soit établi sur des règles
communes à l’échelon national afin de ne pas entraîner un dumping fiscal entre
les territoires qui serait catastrophique pour les populations
- en taxant véritablement les transactions financières.
- en luttant contre les paradis fiscaux
et en harmonisant les législations fiscales au niveau européen
- en modulant le taux de l’impôt sur les
sociétés en fonction de l’utilisation des bénéfices afin de favoriser l’emploi,
les salaires, la recherche, la préservation de l’environnement, etc. ;
Ces propositions sont parfaitement réalistes, Elles concourent
à l’efficacité économique en dégageant des recettes supplémentaires et à la
justice sociale en faisant peser une fiscalité moins lourde sur la majorité de
la population.
Elles impliquent toutefois la volonté politique de rompre avec
les choix précédents qui ont eu pour conséquences l’augmentation des inégalités
et l’aggravation de la crise économique et sociale